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Sigmund Freud: style de vie
Traduction de Liliane Salvadori
10 février 2006
Une grande partie de lexistence dune personne se passe dans lhabitation où elle vit : je débuterai donc décrivant soigneusement le type de lhabitation de Freud, essayant doffrir au lecteur une vive prise de contact avec les lieux et lambiance dans lesquels se déroulait la vie quotidienne de celui qui a découvert la psychanalyse.
Freud vivait via Bergasse - dénommée ainsi à cause de sa forte pente prenant naissance dans une rue principale où sélevaient des bâtiments du 17ème Siècle typiquement viennois ornés au rez-de-chaussée de boutiques à usage commercial. Le Maître vivait dans un immeuble dont lentrée était suffisamment vaste pour permettre à un fiacre laccès direct à la remise située à larrière. Sur la gauche se trouvait lappartement du concierge et sur la droite une rampe et un escalier comportant six marches conduisait à lappartement de trois pièces qui de 1892 à 1908 abrita Freud et sa famille.
Le 6 Mai 1954, la Fédération mondiale pour la santé mentale fit apposer une plaque commémorative au N° 19 de la Bergasse Str. sur laquelle lon pouvait lire linscription suivante (en allemand) :
Dans cette maison, vécut et travailla
le Professeur Sigmund Freud
Fondateur de la psychanalyse
Cette plaque est offerte par le VIème Congrès
Annuel de la Fédération mondiale pour la
Santé mentale, Vienne, Août 1953
En 1930, le Conseil municipal proposa de changer le nom de la rue Bergasse pour « Sigmund Freud str. » mais Freud qui napprouvait pas linitiative fut soulagé lorsquil constata que la proposition était tombée dans les oubliettes. Ce fut cependant le 15 Février 1949 que le Conseil municipal décida de donner le nom de « Sigmund Freud-Hof » à un immeuble du IX district de Vienne avec linscription suivante :
Dr Sigmund Freud, Professor der Neurologie an dei Universität Wien. Begründer der Psychanalyse, 1856-1939.
En 1908, lhabitation de Freud fut soumise à une restructuration : lappartement de trois pièces fut cédé pendant que celui de la sur Rose au premier étage, appartement que Freud était rendu accessible depuis son appartement grâce à linstallation dune porte de communication . Lappartement se présentait ainsi : une salle dattente dotée de fenêtres donnant sur le jardin, pièce suffisamment grande pour permettre durant quelques années les réunions du mercredi de la Société de Vienne. Dans cette pièce se trouvait une table ovale, les murs étaient ornés de pièces dantiquités provenant de la vaste collection de Freud. De cette pièce on pouvait accéder au studio doté dune porte rembourrée, recouverte sur les deux faces de lourdes tentures, un divan pour les séances et une chaise face à la fenêtre qui souvrait sur le jardin. Le jardin était ceint dun mur qui entourait une grotte pseudo-renaissance dans laquelle avait été placée une petite statue de peu de valeur représentant une jeune fille portant une amphore.
Lhabitation était dotée de trois pièces de réception et les chambres à coucher.
La journée de travail du Maître débutait le matin à 8 heures avec un rapide petit déjeuner et la lecture du « Neue Freie Presse » ; le temps des séances était de cinquante cinq minutes. A 13 heures il passait à table où il retrouvait toute la famille, alors quau contraire, le dîner qui avait lieu assez tard ne lui permettait pas de voir les enfants déjà au lit. Freud aimait beaucoup la viande et durant la guerre il souffrit énormément den être privé. Durant les repas il était très taciturne même sil navait pas à se préoccuper des petits problèmes du quotidien. Entre 13 et 15 heures, à moins dun imprévu, il faisait une promenade qui lui permettait entre autres de faire des achats, par exemple chez son bureau de Tabac favori ou se rendre chez les éditeurs afin de remettre les brouillons. A 3 heures il reprenait son travail qui se prolongeait même jusquà 22 h.
Après le dîner il faisait une autre promenade avec sa femme, sa fille ou la belle-sur et quelquefois sarrêtait dans un Café lété au Café Landmann, lhiver au Café Central. De retour à la maison, il se retirait dans son bureau afin de prendre connaissance de la correspondance à laquelle il répondait ponctuellement. Il participait de plus, exposant ses travaux, à des réunions de la Société de Vienne, tous les mercredis et tous les quinze jours à la loge hébraïque, le Bnai Brith. La soirée du samedi était dédiée au jeu de tarots et le dimanche matin, accompagné dun ou plusieurs membres de la famille, il rendait visite à sa mère. Il rencontrait également ses surs prenant activement part à la vie de la famille dorigine.
En ce qui concerne les soins à sa personne, Freud habituellement était sobre et très ordonné, ne consentant aucune attention aux changements imposés par la mode de lépoque. Le vêtement quil aimait le plus porter était un habit datant davant guerre, ample et foncé avec un col dur et bas, une cravate noire à nud fixe et son chapeau préféré était un chapeau noir à larges bords.
Il fit le maximum pour que ses enfants naient pas à souffrir des restrictions économiques. Il était obsédé par cette idée et avait créé un « fond pour la famille », fonds auquel sa femme pouvait accéder et lorsquil quitta Vienne définitivement il remit une certaine somme dargent à ses surs. Sa femme soccupait avec dévouement de la gestion du ménage de la famille, réussissant à réserver un espace afin de sadonner à la lecture de la littérature contemporaine et son plaisir était au summum lorsquelle recevait à la maison un de ses auteurs favoris : Thomas Mann.
Les rentrées dargent sur lesquelles Freud pouvait compter provenaient uniquement de son travail, ses honoraires avant la guerre était de 40 couronnes et ses droits dauteur qui durant plusieurs années étaient réduits, étaient investis lors de cadeaux pour ses enfants.
Durant les 40 premières années de mariage Freud neut aucun problème sérieux de santé : lors du premier épisode douloureux, un abcès se déclare (cétait lépoque de lInterprétation des rêves), puis une infection à la gorge se déclara durant un voyage à Prague. Le problème de santé qui le tourmentait et qui était devenu une source de plaisanterie en famille : une constipation chronique qui fut diagnostiquée parfois comme colite, puis comme colicystite etc
Freud parlait souvent de sa peur de la mort : dun autre côté les calculs « périodiques » de Fliess lui avaient donné 51 ans de vie ! Lorsquil arriva à cet âge, dans le but de conjurer le mauvais sort Freud dit à Ferenczi quil serait mort en février 1918 ; et lorsque cette date fut dépassée il fit ce commentaire : « Cela nous démontre le peu de confiance que nous devons accorder au surnaturel » 1 .
Jusquà présent vous avez la description des journées scandées par sa famille et son travail dans une Vienne qui, lorsquelle lui écrivit dans une forme officielle pour des raisons fiscales, faisant référence à sa célébrité « au-delà des confins de lAutriche »
provoqua la réponse suivante très significative : « Le Professeur Freud est très honoré de recevoir une communication du Gouvernement. Cest la première fois que le Gouvernement lui accorde quelque importance et il en prend acte. Il nest cependant pas daccord sur un point : sur le fait que sa célébrité sétende bien au-delà des confins de lAutriche : elle commence aux confins » 2.
Dans cette existence intense, remplie de pénibles devoirs, nous pouvons comprendre quelle importance pouvaient avoir les vacances dété. En fait, Freud avait lhabitude de prospecter durant les fêtes de Pâques, dans les villes qui par leur climat, les panoramas et la tranquillité pouvaient lui procurer la possibilité de se reposer durant la période des vacances avec sa famille. Avant que la guerre néclate il revêtait durant ses vacances un costume du folklore tyrolien : pantalons courts avec des bretelles très voyantes et un chapeau vert avec un petit touffe de Gamsbart. Il se munissait dun bâton et dune cape dalpin (prévue pour la pluie). Plus tard cet habillement fut substitué par un accoutrement à la zouave et ensuite par un habit sobre de couleur grise. Cétait un grand marcheur et il était passionné pour la cueillette des champignons mais il manquait totalement de sens dorientation. La période des vacances se prolongeait durant six semaines. Il venait rarement en compagnie de sa femme et en était toujours attristé si bien quun jour dans une lettre écrite alors quil se trouvait à Palerme en compagnie de Ferenczi il disait : « Je suis désespéré de ne pouvoir faire en sorte que vous tous puissiez voir ces belles choses. Cela aurait été possible de favoriser un séjour pour 7 ou 9 personnes ou même trois seulement, mais je naurais pas dû être psychiatre ni même être reconnu comme le fondateur dune nouvelle branche de la psychologie mais plutôt être le fabriquant de quelque produit dutilité générale comme par exemple le papier hygiénique, les allumettes ou les boutons de bottines. Mais il est trop tard pour apprendre la leçon donc je dois continuer à jouir dune manière égoïste, tout seul, mais avec un profond remords » 3.
Freud aimait beaucoup écrire et confia aussi bien à Jones quà Ferenczi à quel point cette activité lui permettait de métaboliser limpact du travail découte en séance.
Lors dune occasion il écrivit : « Personne nécrit pour obtenir la célébrité, qui du reste est une chose très transitoire ou lillusion de limmortalité. La première raison qui nous pousse à écrire est certainement celle de satisfaire quelque chose en nous et non de satisfaire les autres. Naturellement lorsque les autres reconnaissent nos efforts, la satisfaction est plus grande et pourtant nous écrivons en premier lieu pour nous-mêmes, suivant une impulsion intérieure. 4 ».
Devant une telle déclaration nous devons nous souvenir de la prestigieuse reconnaissance quil obtint : le Prix Goethe pour la littérature qui lui fut conféré à Francfort en 1930.
© Rossana Ceccarelli
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Note:
1 Ernest Jones, Vita e opere di Freud. Gli anni della maturità 1901-1919, Il Saggiatore.
2 Ernest Jones, Vita e opere di Freud. Gli anni della maturità 1901-1919, Il Saggiatore.
3 Ernest Jones, Vita e opere di Freud. Gli anni della maturità 1901-1919, Il Saggiatore.
4 Ernest Jones, Vita e opere di Freud. Gli anni della maturità 1901-1919, Il Saggiatore.
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