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De lobscurité à la clarté : évolution thérapeutique
dune formation de symptôme à la créativité
Daniela Gariglio, Psychologue psychothérapeute, micropsychanalyste
Daniel Lysek, Médecin, micropsychanalyste
Communication présentée aux Journées de Printemps de la SFPE :
"Le Noir et le Blanc. En thérapie comme en esthétique"
23 et 24 juin 2001, Chalon sur Saône
Publiée dans la Revue Française de Psychiatrie et de Psychologie Médicale,N° 67, tome VII, juin 2003.
Reproduite ici avec l'aimable autorisation des Editions MF : 8, rue Tronchet, 75008 Paris
21 mars 2009
La créativité intéresse le psychanalyste autant sous laspect clinique que thérapeutique, puisque créer peut aussi bien être un symptôme névrotique quune manière déchapper à la névrose. Dans « Pour introduire le narcissisme », Freud cite ces vers de Heine : « cest la maladie qui a été la cause dernière de toute la poussée créatrice ; en créant je pouvais guérir, en créant jai trouvé la santé. » (Freud, 1914). Dans ses « Trois Essais sur la théorie de la sexualité », Freud montre quil existe trois issues possibles pour la sexualité infantile : la voie directe, perverse, la voie défensive, névrotique et la voie sublimée, qui résulte dun désinvestissement des objets et des buts infantiles au profit de productions socialement valorisées (Freud, 1907).
La sublimation décrit donc la dimension non pathologique du processus créateur. Elle fournit une satisfaction substitutive à un désir inacceptable ou permet dexprimer un fantasme inconscient de manière conforme aux valeurs supérieures du moi. La sublimation « permet quune activité culturelle, quelle quelle soit, soit effectuée dune manière aconflictuelle, cest-à-dire dégagée des liens conflictuels qui lunissent aux fantasmes infantiles. » (Flournoy, 1967).
Pour Freud, ce sont les fixations sexuelles qui trouvent dans la sublimation une voie physiologique dexpression. Cependant, Melanie Klein a établi que lagressivité inconsciente détermine elle aussi la créativité dans la mesure où celle-ci vise à réparer les objets internes détruits fantasmatiquement par lenvie (Klein, 1957). Mais la sublimation de lagressivité ne se cantonne pas au domaine fantasmatique. Il semble que toute pulsion agressive puisse se sublimer (Lysek, 1997).
Au cours dun travail analytique ou psychothérapeutique approfondi, on observe souvent que des formations de symptôme tendent à se transformer en activité créatrice. Selon nos observations, cest la levée dun refoulement qui amorce le développement dun processus créateur. Nous avons ainsi été amenés à supposer que la créativité serait une disposition naturelle qui pourrait sexprimer en chacun si elle nétait pas bloquée. A partir de là, nous avons été amenés à supposer que labsence de créativité pourrait provenir dun refoulement des dispositions créatrices. En effet, un dynamisme créatif commence à se développer quand le refoulé cesse de faire retour dans des répétitions compulsives et stéréotypées ; lénergie bloquée dans des représentations traumatiques se libère, se déplace et sinvestit alors dans des expressions originales.
Lévolution thérapeutique vers la créativité sinscrit bien dans le thème de ces journées détude parce quelle ressemble à un passage de lobscurité à la clarté. On peut comparer la créativité à une onde lumineuse et le refoulement à un trou noir qui attire cette onde à lui et lemprisonne ; un jaillissement de créativité serait une onde qui lui échappe, donnant ainsi un point blanc.
Or, il nous semble que ce processus ne se superpose pas à la sublimation. Il paraît plus libre : il se développe plus spontanément et ses manifestations sont moins prévisibles. En cela, nous nous situons dans la ligne des travaux de J. Chasseguet-Smirgel, pour qui le processus créateur « a une fonction dont la portée dépasse celle de la sublimation. En fait il sagit, au moyen de lacte créateur, daccéder à lintégrité en passant par un faisceau de décharges pulsionnelles sublimées. » (Chasseguet-Smirgel, 1971).
Comment définir la créativité qui nous intéresse ici ? Ce nest pas facile, car on ne trouve aucun consensus dans la littérature. Les psychanalystes cherchent moins à comprendre la créativité en soi quà repérer les manifestations de linconscient dans le contenu des uvres. Quils sintéressent au créateur ou à ses productions, ils se focalisent sur les mécanismes inconscients (tels le déplacement, la sublimation, la réparation ou la figuration) qui permettent à lindicible dapparaître au grand jour.
Jung sest aussi penché sur la créativité. Sil nous a éclairés sur le fonds collectif dans lequel le sujet puise pour créer, il nous informe peu sur le processus individuel de la création. En effet, il nous pousse à aller « bien au delà de lindividu » car « luvre jaillit dun processus créatif impersonnel » : « le processus créatif consiste en une animation inconsciente dun archétype, dans son développement et dans sa formation jusquà la réalisation complète de luvre. Donner forme à limage primordiale revient à la traduire dans le langage présent ; cest par lintermédiaire de cette traduction que chacun peut trouver laccès aux sources les plus profondes de la vie qui seraient autrement interdites. » (Jung, 1922).
Même les auteurs dinspiration cognitivo-comportementaliste savouent embarassés : « La créativité est aujourdhui un des termes les plus ambigus, vagues et confus dans le champ de la psychologie et de léducation. » (Ausubel, 1983). Dautres cognitivo-comportementalistes sont encore plus perplexes : « Malgré lénorme prolifération de recherches, la créativité a été définie et décrite de manière très diverse, si bien quest pas facile de trouver dans la littérature un accord sur une définition [
]. » (Mazottta & Olmetti, 1983).
Pour notre part, nous nous situons dans la lignée psychanalytique. Nous cherchons aussi à dégager les contenus inconscients des uvres, mais dans ce travail nous tentons plutôt de comprendre ce qui entrave ou favorise la créativité. Nous nous servons donc dune définition large, formulée en termes concrets et facilement utilisable dans la pratique : la créativité consiste à fournir des productions nouvelles et originales par rapport à soi-même, à lenvironnement immédiat et à la société en général.
Ainsi conçue, la création se ramène à une recomposition ; elle réorganise de manière inédite des éléments inconscients, ce qui ouvre la voie à une réalisation concrète innovante. Précisons quelle ne se limite pas aux productions artistiques ou littéraires. La création nest pas nécessairement matérielle, le processus créateur peut porter sur nimporte quel aspect de la vie. Mais il doit aboutir à une production originale et tangible dans la réalité extérieure. Enfin, il faut quil soit ressenti positivement par le sujet et par dautres (par son entourage ou par un groupe social). Cette définition peut donc inclure un nouveau mode de relation à autrui, une nouvelle manière dorganiser son temps ou son espace, une nouvelle façon dorganiser son travail, pourvu que ce changement nen reste pas au plan mental. Elle exclut donc les productions fantasmatiques, parce quelles ne se jouent pas dans la réalité, et les symptômes, parce quils nont pas lassentiment du moi.
Pour les théories cognitivo-comportementalistes de lapprentissage (Meazzini, 1984), la créativité peut sapprendre, mais elle est la plupart du temps inhibée par léducation. Selon elles, on pourrait développer la créativité en récompensant loriginalité au lieu de récompenser les réponses standard. Ces théories sont séduisantes, mais malheureusement elles ne prennent pas en considération les blocages liés au refoulement. Or, cette dynamique inconsciente peut mettre en échec tout apprentissage. Inversement, répétons-le, lexpérience montre quun déblocage inconscient conduit souvent à des manifestations créatives : on observe la transformation de symptômes en actes originaux et épanouissants.
Avant daller plus loin, il nest pas inutile de préciser le cadre de notre pratique, puisque nos observations résultent de ce cadre. Nous exerçons la micropsychanalyse et la psychothérapie qui en dérive. Fondée par Fanti il y a plus de trente ans, la micropsychanalyse est une forme de psychanalyse freudienne. Mais elle innove sur plusieurs points :
Dune part, les séances sont nettement plus longues et plus fréquentes que dans la technique classique : ce sont des séances de 2 à 4 heures daffilée, et leur rythme est de 4 à 6 par semaine.
Dautre part, le travail analytique est stimulé par létude en séance de documents personnels : photographies, arbre généalogique, plans des lieux où lon a habité, dessins, etc. Ces appoints techniques sont introduits à des moments précis du travail analytique pour nourrir les associations libres et favoriser la prise de conscience de dynamismes inconscients.
Une micropsychanalyse peut se faire de manière continue ou par tranches de quelques semaines séparées par des intervalles de plusieurs mois sans séances. Cest donc une technique à la fois concentrée et souple : le rythme adopté tient compte des disponibilités et du profil de chacun.
Ce nouveau setting a permis des observations originales qui ont conduit Fanti à repenser la théorie classique. Il a cherché en particulier à remonter plus loin dans le développement psychique de lêtre humain. Cest ainsi quil a postulé lexistence dun stade ftal du développement (stade initiatique) et quil a donné une plus large part à lhéritage ancestral dans la constitution de linconscient. Tel que nous le concevons, linconscient nest pas seulement dorigine infantile, il est aussi dorigine ftale et phylogénétique (Fanti, 1981).
Ceci précisé, revenons à la créativité. Le processus créateur permis par levée du refoulement jouit dune assez large liberté : il entretient un rapport souple avec linconscient. Les productions qui en résultent sont évidemment fonction de la structure du sujet et de son histoire personnelle ou familiale. Elles traduisent bien des désirs et des fantasmes inconscients, mais elles nont pas le caractère répétitif des symptômes névrotiques. Cest dailleurs compréhensible, car ils se développent quand le travail analytique est déjà avancé. Le complexe dOedipe a été analysé et le sujet sest affranchi de ses contraintes.
Le clinicien distinguera facilement cette créativité des fantaisies compensatoires du névrosé qui réalise sur le plan imaginaire ce qui lui est défendu dans la réalité. Il ny décèlera ni angoisse, ni culpabilité, ni sentiment dinfériorité. Il constatera que ces créations sexpriment sans grande souffrance, ni renoncements majeurs ; quelles sont adaptées à la réalité et procurent de la satisfaction, sans dépendre exclusivement du principe de plaisir. Cela les distingue également des productions perverses dont laccomplissement, impérieux et stéréotypé, se fait au mépris de lautre et des valeurs socioculturelles.
En introduction, nous proposions de distinguer la créativité de la sublimation. Plusieurs éléments de la pratique nous y incitent. Lanalysé décrit souvent la créativité qui se développe en lui comme une lumière dans son existence, il se sent affranchi des sombres machinations de sa névrose. Son activité créatrice tend à diminuer ses tensions intérieures, elle lui donne un sentiment de plénitude. Sil y a apprentissage, il se fera avec une certaine légèreté.
Lorsquon étudie la sublimation, on observe au contraire des renoncements, un cheminement obscur nécessitant une grande discipline, lattente souvent pénible dune satisfaction ; on y trouve passablement de routine, des exercices souvent fastidieux. Tout cela ne sera jamais aussi répétitif que des symptômes, mais le processus créateur qui nous intéresse ici jouit dune plus grande liberté. Quant au rapport à la libido, il diffère aussi : alors que la créativité porte clairement les marques de la recherche du plaisir, ce rapport est plus indirect dans la sublimation.
Effectivement, la sublimation est une défense réussie (Fenichel, 1945). Même si ce processus fait partie de la normalité, il porte sur des buts pulsionnels inavouables et sur des objets interdits ; il implique donc une répression des buts originels et un renoncement aux objets les plus satisfaisants. En un mot, des déplacements, qui ne procureront au mieux quun plaisir relatif. Puisque la sublimation fait partie dune organisation défensive, elle est passablement prédéterminée par les identifications inscrites dans lidéal du moi. Donc, elle exprimera plus les exigences du surmoi que le bouillonnement du ça. De son côté, la créativité semble plutôt en syntonie avec les désirs ; elle ressemble à un jaillissement énergétique du ça ; elle a la forme dun mouvement utilisant les ressources dun moi suffisamment souple pour se modeler à la réalité. Ainsi, la créativité nous paraît plus primaire que la sublimation.
Un exemple lillustrera. Il sagit dun homme de 35 ans, de niveau universitaire, marié et père de 2 enfants. Sa demande danalyse est motivée par une souffrance morale quil rapporte à un manque dautonomie, à limpression dêtre totalement phagocyté par son travail et dêtre écrasé par son entourage. Il se sent exploité par son père, qui est aussi son employeur dans lusine familiale. Il se plaint du travail subalterne qui lui est imposé, mais il ne peut rien y faire : il travaille comme une bête de somme et ne trouve aucun moyen daméliorer sa situation. Sa vie de famille est réduite et monotone.
Lanamnèse révèle quil a été un enfant obéissant, éduqué à la dure par une mère sévère, qui le punissait et le frappait souvent. Subir la violence a été le seul moyen dêtre en relation avec sa mère et de se sentir exister pour elle ; il a dailleurs fini par érotiser ce rapport. Avec son père, la relation est ambivalente, faite dun mélange dadmiration, de crainte et de haine. Au plan diagnostique, lensemble des éléments recueillis oriente vers une névrose obsessionnelle, avec une organisation anale où prédominent des fixations homosexuelles et sadomasochistes.
Cette analyse fut longue et rencontra de nombreux obstacles. Mais le refoulement pesant sur les désirs homosexuels et sadomasochistes a fini par céder. Dès lors, plusieurs changements ont eu lieu. Dabord, lanalysé a progressivement réorganisé sa vie professionnelle : il allège ses horaires et il se débarrasse des tâches qui ne correspondent pas à sa formation. Peu à peu, il ose faire valoir ses désirs face à son père et, un jour, il profite dune circonstance inattendue pour se faire confier un poste de direction. Cest là que sa créativité donne toute son ampleur : il restructure lusine, développe une nouvelle image de la société et impose de nouveaux produits.
Parallèlement, quelque chose change quant à ses loisirs. Il constate la disparition des rituels compulsifs qui envahissaient, auparavant, tout moment de détente. Dautre part, il na plus goût au sport nautique dangereux quil avait pratiqué de manière effrénée. Ses rapports à son entourage sont désormais moins froids ; il prend plaisir à découvrir la nature avec ses enfants et il peut accepter une certaine fantaisie dans sa vie de couple. Il découvre quil éprouve des émotions.
La longueur de cette analyse na pas seulement tenu aux difficultés à vaincre les résistances anales. Il a aussi fallu analyser un refoulé encore plus archaïque, à savoir un traumatisme lié à la naissance. En effet, il est apparu au cours du travail que linconscient de cet analysé portait la marque dune naissance particulièrement difficile. Il est venu au monde cyanotique, presque mort-né ; il est resté longtemps entre la vie et la mort. Un rêve de fin danalyse permettra de mieux percevoir comment ce traumatisme a été élaboré au fil des séances. Voici le récit quen a fait lanalysé lui-même :
« Devant ma fabrique se trouve un camion plein de sable à décharger. Il fait nuit noire et je suis seul pour effectuer ce travail immense. Je commence par décharger le sable avec les mains, puis je découvre quen employant une pelle, je me facilite grandement la tâche. Il fait jour désormais et je regarde alentour : au lieu des hangars gris, ces sont des maisons toutes blanches, comme dans les pays du sud. Je maperçois quil y a là une sorte de toboggan que je peux utiliser pour me faciliter encore plus le travail. Je le positionne sans difficulté et le sable glisse dun coup par terre. »
Ce rêve est différent de tous ceux quil a apportés jusque là. Cest la première fois que lanalysé se représente faisant quelque chose dun seul coup, sans effort. Les associations qui viendront ensuite indiquent que le rêve corrige le vécu angoissant de sa naissance. Bien plus, ces associations relèvent une autre originalité du rêve : pour la première fois lanalysé parle de paysages ensoleillés et de maisons baignées de lumière ; de manière également nouvelle, le blanc fait son apparition, avec une connotation agréable. Lanalysé en fait le symbole de sa vie actuelle et relie cet éclaircissement au développement de sa créativité. Une catamnèse a pu être faite, car lanalysé a été revu plusieurs années après la fin de son analyse : la créativité sest maintenue et sest même accrue au fil des ans.
Ce cas tend à montrer quune levée du refoulement permet le développement dun processus créateur, qui sexprimera aussi bien dans la vie onirique que dans les activités du sujet. Il indique aussi que cette créativité parvient assez souvent à prendre corps dans la réalité, à se concrétiser en productions tangibles. Lorsque ces actes créateurs sont suffisamment investis, ils constituent des expériences qui laissent des traces psychiques : ils créent de nouvelles représentations mentales ou modifient celles qui préexistaient. Ainsi, le moi se renforce et gagne du terrain sur le refoulé. Ces traces seront à leur tour thérapeutiques, parce quelles augmentent les possibilités dexpression du sujet. Le renforcement du moi peut contribuer à contrecarrer de futurs refoulements en ouvrant des voies de décharge à linconscient. En dautres termes, elles lui donnent une plus grande liberté daction et peuvent éviter au sujet de se réengager dans ses répétitions névrotiques.
Au plan théorique, nous émettons lhypothèse suivante : la créativité serait une dynamique intrinsèque à lêtre humain, distincte de la formation de symptôme comme de la sublimation. Cest probablement pour cette raison quelle fleurit autant dans lactivité onirique que dans les activités éveillées. En effet, les observations micropsychanalytiques suggèrent que le rêve est bien plus quune mécanique à réaliser des désirs. Il apparaît comme une activité cardinale (Fanti, 1981) : il semble pouvoir réactiver les vécus utéro-infantiles mémorisés dans linconscient ; il les ferait se répéter psychiquement en les remettant en scène de manière plus ou moins originale ; il rallumerait aussi des séquences de mémoire phylogénétique et les prolongerait jusquà désexcitation. Soit dit en passant, nous rejoignons là certains travaux neurophysiologiques (Jouvet, 1992).
Enfin, le rêve paraît réorganiser des imprintings psychiques et en former de nouveaux lorsquil intègre lexpérience analytique. Par imprinting psychique, nous entendons des traces durables laissées dans lappareil psychique (sous forme de représentations et daffects) par des expériences suffisamment intenses pour être mémorisées dans le vécu du sujet (Gariglio, 1992, 1997). Lexpérience de la naissance dont nous avons parlé tout à lheure en serait un exemple.
En conclusion, tout indique que lactivité onirique puise des matériaux dans le sombre fonds inconscient, les restructure énergétiquement, puis les façonne en contenus aptes à émerger au grand jour. Or, nous pouvons dire la même chose de la créativité qui était obscurcie par le refoulement et qui sexprimera grâce au travail analytique. Nous pensons donc que la créativité a les mêmes caractéristiques que le rêve et quelle suit les mêmes lois. La formation dun nouvel imprinting, quelle advienne par le rêve ou par lactivité créatrice de létat éveillé, constitue une voie originale dabaissement de tension. Lénergie qui sécoule par cette nouvelle voie diminue la pression du refoulé cherchant à faire retour. Le refoulé cesse ainsi dêtre un trou noir qui avale la créativité, condamnant le sujet à lobscurité de la répétition-symptôme. Grâce aux nouveaux imprintings, le moi gagne du terrain sur le ça et il peut mettre en acte, sous mille formes diverses, des éléments inédits de notre histoire ontogénétique et phylogénétique. Il peut transformer le noir en toutes les nuances de larc-en-ciel
Daniela Gariglio, Daniel Lysek
© Editions MF, Paris
Resumé
On peut actuellement soutenir lhypothèse que la créativité est une faculté humaine universelle. Labsence de créativité résulterait ainsi dun processus dinhibition obscurcissant le potentiel créatif.
Tout se passe comme si les actes créateurs étaient bloqués par refoulement. Lorsquune analyse ou une psychothérapie parvient à lever le blocage, on assiste au développement spontané dune activité créatrice. La non-créativité pourrait donc être assimilée à un symptôme névrotique, qui peut être douloureux et gênant.
Lexpression dune créativité est souvent vécue par le sujet comme une lumière dans son existence. Il la décrit par exemple comme un cheminement de lobscurité à la clarté, cela ne cadre pas avec la sublimation, qui évoque renoncement ou souffrance.
Les auteurs émettent lhypothèse que la créativité est un phénomène distinct de la sublimation et plus primaire quelle. Avec un exemple clinique, ils sappuient sur la théorie micropsychanalytique pour établir un parallèle avec le travail du rêve. Pour la micropsychanalyse en effet, le rêve puise des matériaux dans le sombre fonds inconscient et les façonne en contenus psychiques aptes à paraître au grand jour. La créativité semble faire de même
Mots clés:
créativité
sublimation
refoulement
rêve
micropsychanalyse
Summary
From darkness to light: therapeutic evolution from the formation of a symptom to creativity
Creativity is considered to be today a universal human faculty. The absence of creativity could come from a process of inhibition obscuring the creative potential.
Clinical evidence appears to show that creative acts are blocked by repression. When an analysis or a psychotherapy can remove the blockage, a spontaneous development of creative activity may be observed. The absence of creativity could therefore be similar to a neurotic symptom, which may be painful and disturbing.
Creativity is often perceived by the subject as a light in their life. For instance the subject describes it as a passage from darkness to light. This doesnt conform with sublimation, which implies loss or pain.
The authors propose the hypothesis that creativity is a phenomenon different from, and more primary than, sublimation. Using a clinical example and based on micropsychoanalytical theory, they establish a parallel with dream work. According to micropsychoanalysis, dreams extract elements from the dark unconscious and shape these elements into psychic contents ready to emerge. Creativity seems to follow the same process.
Key words:
creativity
sublimation
repression
dream
micropsychoanalysis
Références bibliographiques:
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